Ali Bongo auditionné à Paris : l’ex-président gabonais accuse ses geôliers de séquestration et tortures après le coup d’État



2025-07-02 10:46:00

Paris, 2 juillet 2025 — L’ancien président gabonais Ali Bongo Ondimba, sa femme Sylvia Bongo et leur fils Noureddin Bongo Valentin ont été entendus les 30 juin et 1er juillet par deux juges d’instruction à Paris. Motif de leur présence ? Une plainte pour séquestration arbitraire, tortures, actes de barbarie et enlèvement, déposée en mai 2024. Le trio accuse la junte militaire gabonaise d’avoir bafoué leurs droits humains après le coup d’État du 30 août 2023. Une procédure inédite, qui soulève autant de curiosité que de scepticisme.



L’initiative surprend. Pendant près d’un an, le clan Bongo est resté silencieux, muré dans un isolement quasi total après avoir été écarté du pouvoir. L’apparition d’Ali Bongo dans un tribunal parisien, en plaignant supposé d’un régime brutal, constitue un retournement de stratégie médiatique. L’homme que certains pensaient fini tente de retourner l’opinion internationale en se présentant désormais comme une victime du système militaire, celui-là même qu’il avait alimenté et instrumentalisé durant ses 14 années au pouvoir.

Mais la démarche pose question. Car si l’on peut légitimement condamner toute forme de mauvais traitement, il est difficile d’oublier que l’ancien président est accusé par une large partie de la population gabonaise d’avoir muselé les libertés, pillé les ressources et laissé prospérer une gouvernance familiale aux allures monarchiques.

Il est troublant d’entendre Ali Bongo parler de séquestration quand lui-même fut accusé de pratiques similaires envers ses opposants politiques. Les ONG comme Human Rights Watch ou Amnesty International ont longtemps dénoncé des arrestations arbitraires, une justice instrumentalisée et un climat de peur entretenu sous son régime. Peut-on alors croire sincèrement à sa nouvelle posture de victime des droits humains ?

Sylvia Bongo, longtemps surnommée la « présidente bis », est elle aussi pointée du doigt. Son implication dans la gestion de l’État, sans aucun mandat électif, a alimenté les critiques d’un pouvoir confisqué par un clan familial. Aujourd’hui, elle se dit elle-même victime d’un enlèvement. Un revirement narratif difficile à avaler pour une opinion publique encore marquée par les excès du régime déchu.

En saisissant la justice française, les Bongo semblent vouloir bypasser les institutions nationales, qu’ils jugent illégitimes ou manipulées par le Comité de Transition. C’est là encore un acte politique fort, mais aussi potentiellement hypocrite, venant de ceux qui ont longtemps ignoré les appels à une réforme de l’appareil judiciaire gabonais.

S’il y a eu torture ou traitement inhumain, il est essentiel que les responsables soient sanctionnés. Mais cette plainte peut aussi être interprétée comme une manœuvre de réhabilitation politique, voire une tentative de redorer une image internationale ternie.