Importation automobile au Gabon : une réforme choc qui fait grincer des dents



2025-06-12 12:25:00

C’est une mini-révolution réglementaire qui secoue le secteur automobile. Depuis le 5 février 2025, plus aucun véhicule ne peut sortir du port d’Owendo sans avoir franchi un triple verrou administratif : certificat d’homologation, police d’assurance au tiers et numéro d’identification provisoire. Une mesure qui chamboule les habitudes… et crispe déjà les professionnels.



Le Gabon verrouille l'importation de véhicules

Derrière cette nouvelle procédure, une volonté de reprise en main. Désormais, deux entreprises privées — la S.I.S (Société d’Inspection et de Spécialisation) et SUNU Assurances IARD Gabon — deviennent les passages obligés pour tout importateur.

La S.I.S est chargée de la réception technique et de la délivrance des plaques provisoires, tandis que l’assurance ne peut être contractée qu’auprès de SUNU. Un autocollant à sept caractères sera également apposé sur les pare-brises, à l’avant comme à l’arrière.

Sécurité ou privatisation masquée ?

Si l’administration se défend en invoquant la sécurisation du parc automobile, la traçabilité des véhicules et la lutte contre la fraude, le flou règne sur plusieurs aspects-clés. Notamment les coûts de cette procédure, entièrement supportés par les usagers, et non précisés dans la note officielle. Pour les importateurs occasionnels et les petits revendeurs, c’est l’inquiétude :

« En l’absence de barème clair, comment éviter les abus ? », interroge un transitaire.

De plus, cette réforme n’a fait l’objet d’aucune concertation préalable, ce que dénoncent plusieurs opérateurs. “C’est brutal, mal préparé, et dangereux pour l’économie informelle qui vit de ce secteur”, confie un autre professionnel.

Vers un monopole organisé ?

Pour plusieurs observateurs, cette réforme est aussi révélatrice d’un tournant plus politique : la concentration progressive des marchés publics autour d’acteurs privés choisis par l’État, sans appel d’offres ni transparence sur les conventions de délégation.

“Ce n’est plus une régulation, c’est une privatisation de fait de missions régaliennes”, alerte un économiste.

Dans un pays où la confiance entre administration et citoyens reste fragile, cette réforme suscite d’autant plus de soupçons qu’elle semble taillée sur mesure pour deux entreprises. Une stratégie assumée de verrouillage du secteur ? Peut-être. Mais sans dialogue, contrôle des prix, ni mécanismes de recours, le risque d’un rejet massif est réel.