Mali : Rumeurs de putsch, tensions internes, pluie d’arrestations. La junte face à ses propres fantômes

2025-08-14 13:58:00
En l’espace de quelques jours, entre 36 et 40 militaires maliens, dont de hauts gradés, ont été arrêtés dans ce qui ressemble à un vaste coup de filet interne.
Parmi eux, deux figures marquantes : le général Abass Dembélé, ancien
gouverneur de Mopti, et la générale de brigade Nema Sagara, l’une des femmes
les plus gradées de l’armée malienne, au parcours salué au Mali comme à
l’international. Formée au Mali, en France et aux États-Unis, cette dernière a
participé directement aux combats pour protéger les populations civiles, ce qui
rend son arrestation d’autant plus saisissante. Officiellement, silence radio :
ni l’armée ni le gouvernement ne confirment les faits, mais les confidences en
coulisses évoquent une volonté claire de neutraliser toute contestation dans
les rangs militaires, pilier du pouvoir depuis les coups d’État de 2020 et
2021.
Cette vague d’arrestations survient dans un climat politique verrouillé. En
avril, la « conférence nationale de refondation » a recommandé de confier à
Assimi Goïta un mandat présidentiel de cinq ans, renouvelable sans limite,
tandis que partis et activités politiques sont gelés depuis mai. Sur le
terrain, la situation sécuritaire reste critique : le Groupe de soutien à
l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda, multiplie attaques,
enlèvements et contrôle des routes commerciales, élargissant son influence au
Burkina Faso et au Niger. Les groupes armés combinent désormais guérilla
classique et guerre psychologique, entretenant un climat de peur dans les zones
rurales et ébranlant les priorités affichées de la junte : sécurité, intégrité
territoriale et souveraineté.
Depuis son arrivée au pouvoir, la junte a rompu avec ses alliés occidentaux
traditionnels, mis fin à la coopération avec la France et quitté le G5 Sahel,
ouvrant la voie à un partenariat stratégique avec la Russie. Mais cette
proximité, saluée par certains, est vue par d’autres comme une nouvelle
dépendance. L’arrestation soudaine de cadres influents révèle un pouvoir de
plus en plus nerveux, peut-être hanté par la peur de la trahison. Dans une
armée censée être le socle de son autorité, l’apparition de fractures internes
pourrait représenter une menace plus dangereuse qu’un ennemi extérieur.